Assise dans un renfoncement aménagé en banquette, Isabel de Saint-Gil lisait à la lueur d'une lampe à gaz dont la flamme oscillait à peine. Elle était aussi belle qu'élégante. Grande et mince, la taille prise dans un corset qui l'obligeait à se tenir droite tout en soulignant de charmantes rondeurs, elle portait encore la robe beige à tournure ivoire qu'elle avait revêtue avant d'aller dîner, seule, au wagon-restaurant. Elle avait tout au moins ôté son chapeau, et son épaisse chevelure rousse, où serpentaient des flammèches blondes, était relevée en un chignon raffiné qui épargnait quelques virgules follettes au creux de la nuque. Absorbée par sa lecture, la jeune femme resta longtemps immobile sinon pour tourner une page, son délicat profil caressé par un rien de lumière dorée. Puis elle ramena une jambe sur l'autre dans un léger froufrou soyeux. Une jolie bottine vint à pointer, qui souleva la jupe et les jupons dont la lourde corolle, dés lors, tangua selon les lents balancements que lui imprimait la marche du train.
Non, ce n'est pas un extrait d'un ouvrage coquin du début du XXe siècle.
Imaginez un Arsène Lupin en jupons.
Imaginez un comte de Champignac, dans sa jeunesse, qui serait mage en plus d'être inventeur.
Imaginez la truculence d'un scénario et des dialogues d'un Gil Jourdan dans un Paris de 1909 où la magie et les créatures féeriques seraient présentes.
Ca vous donnerait quelque chose d'assez semblable à ce qu'on trouve dans Les Enchantements d'Ambremer de Pierre Pevel.
((même si au moins un des habitués de ces lieux ne partage pas mon enthousiasme))
Je l'avais lu en Poche il y a quelques années, mais cet éditeur n'a jamais daigné publier la suite. Maudit soit-il.
Mais, grâce à cet autre mage qu'est Alias, je viens d'apprendre que la série a été reprise par Bragelonne.
Je viens donc de me relire le premier volume, toujours avec autant de plaisir (évidemment, j'ai longtemps été sous l'emprise d'une fée rousse qui savait aussi se faire "extrêmement charmante", ça a peut-être réduit ma résistance au sortilège). Et je vais me lancer dans la suite.
La couverture du premier tome en Livre de Poche représentait un peu tout à la fois. Les nouvelles illustrations chez Bragelonne, en faux art-nouveau, ne m'interpellent pas trop.
On y reconnait la baronne, et, j'imagine (la lecture me le confirmera peut-être), la reine blanche et la reine noire.
Si l'approche de l’automne vous rend un peu tristounet(te), je vous invite à lire ces bouquins, qui, je n'en doute pas, vous mettront le sourire aux lèvres presque à chaque page.
Et oui, j'y vais en confiance, avant même d'avoir lu les deux derniers tomes !
EDIT (19 septembre):
Après lecture des deux volumes suivants, je ne change pas d'avis, même s'il faut déplorer quelques copier-coller. Les tomes 2 et 3 sont aussi sans doute moins amusants que le premier.
Il est tout de même dommage que l'épilogue du dernier volume commence par indiquer la condamnation et la décapitation d'un personnage tué dans une explosion quelques chapitres plus tôt.
Ca fait un peu négligé.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire